Les cimetières de La Mitis
On dénombre 20 cimetières sur le territoire de La Mitis. Le saviez-vous? Cet article revisite la série de publications Instagram d’octobre 2023 portant sur nos cimetières. En découvrant nos cimetières, nous découvrons notre histoire.
Les cimetières du littoral
Les colons se sont d’abord installés le long du littoral lorsqu’ils sont arrivés dans les seigneuries Lepage-et-Thibierge et Métis. Cela explique pourquoi les plus vieux monuments se trouvent aux cimetières de Sainte-Luce-sur-Mer, de Sainte-Flavie, de Grand-Métis et de Métis-sur-Mer. La plus vieille tombe de La Mitis date de 1832, mais elle a été retirée du cimetière de Sainte-Flavie à cause de vandalisme. Les bénévoles du comité du patrimoine devront décider de son sort dans les mois à venir.
Un autre cimetière a souffert de mauvais traitements. Deux statues en cuivre ont été volées à Sainte-Luce-sur-Mer en août 2002. Saint-Pierre et Saint-Paul ornaient le calvaire avant de disparaître. Ils n’ont jamais été retrouvés.
Ce cimetière est parfois appelé «cimetière marin». C’est parce qu’il se trouve aux abords du fleuve Saint-Laurent, pas à cause du nom de famille de la première personne enterrée à Sainte-Luce. Luce Marin est décédée toute jeune, à 14 mois. Le registre paroissial indique que sa famille venait de Métis, mais ses parents ont été enterrés à Saint-Damase et à Saint-Moïse.
Un décor enchanteur caractérise le cimetière de l’église presbytérienne à la Pointe Leggatt. On entend les vagues et on voit la mer entre les branches des conifères. À l’époque, on risquait beaucoup à naviguer dans cette section du fleuve, à cause du brouillard épais et des récifs dangereux. Un monument a été érigé à la mémoire de ceux qui ont péri dans des naufrages. Le nom de la rue l’Anse-des-Morts rappelle ces décès survenus en mer.
La barque Amanda était en route vers Québec lors de son naufrage, le 26 septembre 1841. Elle avait quitté l’Irlande et avait passé 35 jours en mer. Les canots de sauvetage ont été submergés. 40 personnes ont perdu la vie, mais 17 ont survécu, incluant le capitaine et quelques membres d’équipage qui sont restés sur l’épave et qui ont pu être secourus. La brigantine Ocean, quant à elle, a fait naufrage le 23 octobre 1846 : 11 morts, 2 survivants. Ces tragédies maritimes ont mené à l’érection du phare de la Pointe Mitis en 1874.
Le développement des colonies a amené des déplacements vers l’intérieur des terres. Les missions étaient encore trop peu peuplées pour avoir leur église et leur cimetière. Où enterrait-on les morts quand il n’y avait pas de cimetière au village? Dans le cimetière voisin. Zéphyrin Landry, un jeune adolescent, est décédé à Saint-Joseph-de-Lepage en 1874. Le village n’avait pas encore de cimetière. Il faudra attendre encore 2 ans avant son ouverture. L’adolescent a été inhumé au cimetière de Sainte-Flavie, face à la mer.
Déménagements
L’emplacement des cimetières a parfois dû être révisé. Le mauvais drainage de l’eau au printemps a nécessité le déménagement du cimetière de Padoue. Le Conseil d’hygiène provincial avait pourtant approuvé le site derrière l’église en 1910. Mais deux ans plus tard, le site ne convenait plus. Il y avait deux pieds d’eau, apparemment. Le cimetière se trouve maintenant aux intersections des rues Beaulieu et Gagnon.
À Sainte-Angèle-de-Mérici, on a déplacé le cimetière pour construire l’école primaire du village. Les familles étaient responsables d’exhumer leurs défunts pour les enterrer dans le nouveau site. Mais certaines dépouilles sont restées sur place et le bulldozer est passé là-dessus pour préparer le chantier. Les enfants qui ont fréquenté l’école du Portage à son ouverture trouvaient parfois des os en jouant dehors à la récréation. Ils les apportaient aux sœurs quand cela arrivait.
© Comité du Patrimoine de Sainte-Angèle-de-Mérici
© Comité du Patrimoine de Sainte-Angèle-de-Mérici
Du côté de Price, ce n’est pas le cimetière qui a changé d’emplacement, mais les statues qui décoraient la cour du presbytère. Lorsque le vieux presbytère a été vendu, les statues n’avaient plus de raison d’être puisque l’édifice changeait de vocation. Elles veillent maintenant sur le cimetière. Vous verrez la statue de Marie protégée par les hauts cèdres qui séparent le cimetière et la rivière Mitis en contrebas. Au fond du cimetière de Price, on trouve aussi une autre statue : Marie qui tient Jésus descendu de la croix dans ses bras. Ce type de scène est appelé Pietà et représente l’une des 7 douleurs de la Vierge Marie.
Faits divers :
Les histoires noires
À Sainte-Jeanne-d’Arc, on creuse dans le sol du cimetière une dizaine de fois par année. Mais le cimetière a connu des années sombres : 1934, 1935 et 1937. Les épidémies étaient féroces dans les années qui ont suivi le krach boursier de 1929. La mortalité infantile a grimpé en flèche. On creusait 20 tombes par année au lieu de 10. Une seule famille a été durement éprouvée en perdant 3 jeunes enfants à l’intérieur de 6 mois. Deux tombes seulement restent comme témoin de ces années difficiles. Les familles qui n’avaient pas les moyens de louer une concession enterraient leur défunt dans la fosse commune le long de la clôture ou au fond du cimetière.
Les bénévoles qui s’occupent du cimetière de Saint-Joseph-de-Lepage ne s’attendaient pas à jouer les enquêteurs lorsqu’ils ont découvert qu’une pierre tombale avait été installée sur une autre, celle-ci face contre terre. En faisant leur recherche, ils ont découvert une histoire de deuxième mariage. Les deux femmes d’un Lepageois partageaient la même concession. On avait effacé le nom de la première épouse en couchant sa tombe, en installant celle de la deuxième épouse par-dessus. La pierre tombale de la première épouse est maintenant redressée, sa mémoire, honorée et on peut se recueillir sur sa tombe.
Les traces de la guerre
Les différents conflits armés qui ont marqué le XXe siècle ont été vécus jusque dans les villages mitissiens. Avez-vous entendu parler de la guerre des Boers? Il s’agissait d’un conflit qui opposait les républiques boers (aujourd’hui, ces régions font partie de l’Afrique de Sud) et les forces britanniques.
Ovide Smith, un Flavien, a rejoint le bataillon canadien de fusiliers à cheval pour prêter main-forte aux Anglais. Il est décédé à Bloemfontein, la capitale de la république boer du Transvaal, où les conflits avaient lieu. Il est mort de la fièvre entérique et a été inhumé au cimetière de Middelburg (Mpumalanga) à 557 kilomètres de Bloemfontein. Sa mémoire est aussi honorée à Sainte-Flavie, où on trouve son nom sur un monument familial.
Extrait du journal La Presse du 10 octobre 1900 (p.8).