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Mont-Joli, l’engagée

Mont-Joli est bien plus qu’un simple village-relais le long de la 132. Connaissez-vous bien la ville au coeur de La Mitis? Et savez-vous comment les femmes ont, depuis les débuts de Mont-Joli, influencé la vie urbaine?

La création de Mont-Joli

Le village de Sainte-Flavie-Station (Mont-Joli) s’est détaché de la municipalité de Sainte-Flavie lorsque le chemin de fer L’Intercolonial y a ouvert une gare en 1874. En 1880, l’année de son érection municipale, Sainte-Flavie-Station comptait 390 habitants. Il régnait une confusion entre les frontières paroissiales et municipales de Sainte-Flavie et de Sainte-Flavie Station. La gare de Sainte-Flavie se trouvait dans la municipalité de Sainte-Flavie-Station. Cette confusion a duré jusqu’en 1914, quand le jeune village a changé de nom pour devenir Mont-Joli, et que la gare de l’Intercolonial et le bureau de poste ont emboité le pas.
Le village s’est construit autour de la gare. Les deux premières rues s’appelaient les rues de l’Intercolonial et Métapédiac. Elles sont devenues la rue de la Gare et le boulevard Jacques-Cartier. Un accident mortel a eu lieu en 1908 au passage à niveau sur la rue Métapédiac (l’actuel boulevard Jacques-Cartier). Les autorités ont ensuite fait creuser le sol pour que la route et le chemin de fer ne se croisent plus. Voilà pourquoi le boulevard Jacques-Cartier passe sous la voie ferrée près de la bibliothèque Jean-Louis-Desrosiers.

Gare de Mont-Joli (Sainte-Flavie-Station) vers 1910, gracieuseté de la ville de Mont-Joli

Gare de Mont-Joli inaugurée en 1913, gracieuseté de la ville de Mont-Joli

Centre-ville de Mont-Joli dans la 1e moitié du 20e siècle, gracieuseté de la ville de Mont-Joli

Boulevard Jacques-Cartier, anciennement le Boulevard Perron et la rue Métapédiac, gracieuseté de la ville de Mont-Joli

Le Sanatorium

La colline qui surplombe Mont-Joli ne faisait pas partie des délimitations de la municipalité lors de la séparation de Sainte-Flavie, bien que ce soit elle qui ait inspiré le nom Mont-Joli. Au sommet de la côte, le Sanatorium domine la vue. Il a été construit en 1939 et son objectif premier était de combattre la tuberculose. Dans les années 1950, c’était même le centre antituberculeux le plus important du Québec.
Certains patients du Sanatorium se sentaient comme s’ils séjournaient à l’hôtel grâce à la qualité des soins! Il faut le dire, le Sanatorium a été construit à un emplacement de premier choix pour permettre aux patients de se reposer et de profiter de l’air frais. Radio-Canada a consacré un épisode fort intéressant au Sanatorium en 2021.
Les religieuses y ont apporté les soins aux malades jusqu’en 1969. Elles se sont regroupées dans le Syndicat professionnel des infirmières catholiques du diocèse de Rimouski en 1957 à travers l’Association des garde-malades licenciées. En 1962, elles ont réussi à négocier un mois de vacances après 10 ans de service. En 1964, elles ont obtenu le droit de grève pour dénoncer le manque d’infirmières au Bas-Saint-Laurent et en Gaspésie.

Vue de la façade sud du Sanatorium, gracieuseté de la ville de Mont-Joli

Vue de la façade nord du Sanatorium ©H.V. Henderson (entre 1930 et 1950)

Les changements dans la société

Mont-Joli n’a pas échappé à l’influence américaine du début du 20e siècle et à l’engouement pour le cinéma. Entre les années 1913 et 1925, Joseph Hudon faisait la tournée de la Gaspésie avec son projecteur à manivelle : il projetait des films sous une tente en se promenant de village en village.
Une salle de cinéma a ouvert ses portes à Mont-Joli, mais a souffert des réprimandes de la Ligue des bonnes mœurs, responsable de sa fermeture vers 1928. Son propriétaire a quitté Mont-Joli peu après. Les activités «immorales» et la contrebande étaient vues comme des maux à éradiquer. La Ligue a intenté 32 poursuites devant les tribunaux pour vagabondage ou consommation de boisson. Elle a gagné presque toutes ses causes. Elle a aussi fait opérer 4 descentes et a fait faire 3 saisies.

Restaurant Au P’tit Maxim et cinéma, gracieuseté de la ville de Mont-Joli

Les femmes de Mont-Joli

La lutte moralisatrice des années 1920 et 1930 a pesé lourd sur les femmes. Le journal La Vie Paroissiale publiait des articles contre le suffrage féminin. Les femmes avaient le droit de vote au niveau fédéral depuis 1918, mais elles ne l’ont obtenu au palier provincial qu’en 1940. Le journal condamnait les femmes qui fumaient, les femmes qui dansaient (et leurs mères qui permettaient cela!), les femmes qui gagnaient un salaire et celles qui portaient des pantalons (les articles dénigraient les «chevalières de la culotte»). Les maillots de bain, le rouge à lèvre et les romans qui n’étaient pas chrétiens ont aussi été attaqués.
Malgré ces pressions imposées aux femmes, des pionnières sont sorties du moule et ont prouvé que les femmes avaient leur place dans l’espace public. Parmi elles, notons :

Madame Alexandra : Elle facturait 25 sous pour tirer des cartes et dire la bonne aventure et remettait une partie de ses revenus à des causes charitables.

Aline Deschênes : Première femme élue en tant que conseillère municipale, Aline Deschênes a siégé au conseil dans les années 1980.

Cécile Gendron : Ayant perdu la vue à 20 ans, Cécile Gendron est devenue la première fleuriste aveugle au pays. Elle a opéré son commerce pendant 25 ans, jusqu’en 1973.

Célestine Langlois : Elle a pris la relève de son mari comme photographe après son décès. Elle a travaillé de 1925 à 1945 et les clichés qu’elle a réalisés sont les témoins de son talent.

Danielle Doyer : Femme politique, Danielle Doyer a été la première femme élue à la mairie de Mont-Joli (2013-2017) et la première femme élue députée de la circonscription provinciale de Matapédia (1994-2012). Cette circonscription est devenue Matane-Matapédia en 2012 et La Mitis en fait partie.

Joséphine Partika : Immigrante d’origine polonaise ayant vécu aux États-Unis, Joséphine Partika a ouvert le premier restaurant de Mont-Joli dans les années 1920, en face de la gare. Ses talents culinaires étaient sans égal et son restaurant restait ouvert 7 jours sur 7.

Hélène Grant-Dupéré : À l’aise autant en français qu’en anglais, Hélène Grant-Dupéré a été la première gérante du premier hôtel de Mont-Joli, l’Hôtel Lavoie.

Lise Boulanger : Première Mont-Jolienne à réussir l’examen du Barreau, Lise Boulanger est aussi devenue la première avocate protonotaire du Québec.

Marcelle Boulanger : Pionnière dans le journalisme, Marcelle Boulanger a collaboré avec son mari à la rédaction de l’hebdomadaire Mont-Joli Nouvelles.

Micheline Carrier : Autrice de 7 essais féministes, elle a créé la maison d’édition Sisyphe avec Élaine Audet. Cette maison d’édition continue de publier des essais sur les enjeux sociaux et politiques d’actualité.

Raymonde Verreault : Née à Mont-Joli en 1938, Raymonde Verreault est la première femme à avoir occupé le poste de juge en chef d’une cour au Québec. Après une carrière d’avocate, elle a accédé à la magistrature comme juge à la Cour municipale de Montréal (1986-1992) puis à la Cour du Québec (1992-1993). Elle est retournée à la Cour municipale de Montréal, mais cette fois-ci comme juge en chef (1994-2001) , puis elle a siégé à la Cour du Québec (2001 et 2008). Raymonde Verreault est décédée en 2021.

Rolande Pelletier : Co-fondatrice avec son mari de la chaîne de supermarchés GP, Rolande Pelletier a joué un rôle majeur à Mont-Joli, puisque le siège social de son entreprise s’y trouvait. On comptait 15 supermarchés GP, dont 7 dans l’Est-du-Québec. Il s’agissait de l’une des chaînes québécoises indépendantes les plus importantes avant d’être cédées à Métro en 2009.

Thérèse Beaulieu-Roy : Co-fondatrice des Ateliers Plein Soleil, Thérèse Beaulieu-Roy a permis le rayonnement des métiers d’art en région. Cette boutique où sont vendus des produits d’artisanat local nourrit les sentiments de solidarité et de coopération à Mont-Joli et dans La Mitis.

Aline Deschênes

Cécile Gendron

Lise Boulanger

Marcelle Landry-Boulanger

Micheline Carrier

Raymonde Verreault

Rolande Pelletier

Thérèse Beaulieu-Roy

La maison de naissances Colette-Julien

Mont-Joli se distingue des autres villes de la région par les services offerts aux femmes, dont la maison de naissances Colette-Julien. Ce centre de services en périnatalité a ouvert en 1994, en tant que projet pilote. C’était la première maison de naissance en région et elle est encore ouverte, 30 ans plus tard! La présence d’une maison de naissances dans La Mitis permet aux mitissiennes de choisir le type de suivi qu’elles veulent pendant leur grossesse, un choix important. Des femmes se déplacent d’aussi loin que de Sainte-Anne-des-Monts et même du Nouveau-Brunswick pour bénéficier de l’expertise de nos sages-femmes!
Madame Colette Julien, née à Mont-Joli en avril 1927, a exercé en tant qu’infirmière à l’Unité Sanitaire de Rimouski jusqu’en 1950, puis au service médical Saint-Charles-Garnier. En 1952, elle a établi un hôpital privé spécialisé en obstétrique, incorporé en 1960 sous le nom de Corporation de l’Hôpital Notre-Dame-du-Rosaire de Mont-Joli, mieux connue en tant que la maternité de Mont-Joli. En 1969, suite à une directive gouvernementale, toutes les institutions similaires dans la province ont fermé. Femme avant-gardiste d’une forte personnalité et d’une grande énergie, Colette Julien a dédié sa vie au service des autres. Son dévouement, sa disponibilité, sa générosité et sa chaleur humaine ont été appréciés par tous ceux qui l’ont côtoyée. Elle est décédée le 9 novembre 1978. En reconnaissance et en hommage, la Maison de naissance de La Mitis porte aujourd’hui son nom.

Mme Colette Julien, Photo tirée du livre du centenaire de Mont-Joli, Mont-Joli Histoire et illustrations de son premier cent ans (1880-1980), p.248.

Les organismes communautaires

De nombreux organismes communautaires desservent la population mitissienne depuis Mont-Joli. Le Centre Femmes Mitis a ouvert en 2001 et ne cesse de se dépasser depuis. Ce centre offre des milieux de vie, des ateliers culinaires, un groupe d’achat qui permet de diminuer les coûts de l’épicerie, une friperie gratuite, de l’accompagnement individuel et du soutien en cas de violence conjugale, et plus encore, aux femmes de tous les horizons. Les travailleuses du centre développent différents projets et une programmation variée pour rejoindre les femmes de tous âges. Tous les services sont gratuits, et toutes les femmes sont bienvenues!
La halte-bébé offerte à la Maison des familles les mercredis après-midi permet aux jeunes mères de se rencontrer entre elles et de discuter de différents sujets reliés à la maternité, à la parentalité, au développement des enfants. Les rencontres se font toujours avec une marraine d’allaitement et une sage-femme ou une infirmière. Les mamans peuvent discuter et prendre un café entre elles pendant que les bébés s’amusent avec les nombreux jouets offerts sur place. La halte-bébé donne aux jeunes mères un espace où discuter de leurs enjeux avec d’autres jeunes mères qui peuvent vivre des situations similaires.
À Mont-Joli, on trouve aussi Moisson Mitis, qui vient en aide aux ménages vulnérables en offrant des paniers de nourriture, et la Maison des Tournesols. Cet organisme offre un milieu de vie accueillant et sans jugement aux adultes ayant des difficultés émotionnelles ou aux prises avec des enjeux de santé mentale ou de différence intellectuelle. La Maison de Tournesols a célébré en 2023 son 50e anniversaire! Cela mérite d’être souligné!

© Centre Femmes Mitis

© Centre Femmes Mitis

Aujourd’hui

Avec son centre d’achat, ses organismes communautaires et sa programmation municipale, Mont-Joli n’a rien à envier aux grandes villes.
Mont-Joli est vivante et créative. Comme la ville organise de nombreuses activités à caractère familial, les occasions pour socialiser sont nombreuses. Parades d’Halloween et de Noël, contes à la bibliothèque Jean-Louis-Desrosiers et spectacles font partie des bonheurs faciles dédiés aux familles mitissiennes. Nous devons également féliciter l’équipe des loisirs de la ville de Mont-Joli, qui a rapidement mis sur pied un service de garde temporaire pour soutenir les familles et le personnel enseignant et infirmier pendant la grève du front commun en 2023.
Annie Blais est devenue conseillère municipale pour aider au développement de sa ville. Sa présence au conseil municipal permet d’assurer une représentation de la population féminine aux tables où se prennent les décisions. Ce qu’elle aime de Mont-Joli, ce sont les sourires et les «bonjour» qui s’échangent dans la rue. «Les gens qu’on croise finissent par devenir des amis» dit-elle. C’est vrai.

© Ville de Mont-Joli

© Ville de Mont-Joli

Mont-Joli mérite qu’on prenne le temps nécessaire pour la découvrir. Voici nos suggestions pour apprendre à connaître la ville:

Rencontrez les propriétaires des friperies de Mont-Joli, des femmes inspirantes.

Informez-vous sur le patrimoine militaire de La Mitis et l’héritage de la 9e école de bombardement et de tir.

Complétez le parcours artistique des fresques murales.

Visitez le cimetière de Mont-Joli.

Invitez vos jeunes à lire les 4 tomes de la série Mistral, écrite par Pierre Labrie de Mont-Joli. La série raconte un combat contre les forces du Mal qui prend place ici, à Mont-Joli.

Explorez le centre d’interprétation Zoom Nature dans l’ancienne petite gare de Rivière-Blanche pour découvrir les merveilles naturelles de la région

Profitez d’une marche paisible ou d’une sortie en ski de fond au parc du ruisseau Lebrun.

Merci à Sonia Lévesque de la ville de Mont-Joli pour la collaboration à la rédaction de cet article.

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Auteur Christine Bédard

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